Champion unanimement respecté par ses pairs et par le public, tant pour son jeu que pour son attitude, Dominic Thiem, héros tragique, oscille entre Hercule et Sisyphe. Après des premiers faits d’armes sur terre battue, le tennisman autrichien connaît la consécration sur dur en Masters 1000, à Indian Wells, puis en Grand Chelem, à l’US Open. Blessé puis battu, presque abattu, Dominator traverse actuellement une période délicate de sa carrière.

Hercule Thiem

Successeur de Nadal

Fils de professeurs de tennis, enfant de la balle, Dominic Thiem se fait remarquer par de brillants résultats dans la catégorie junior en 2011. La même année, il domine au tournoi de Vienne le vétéran Thomas Muster, ancien vainqueur de Roland-Garros et plus grand joueur autrichien de l’histoire, qui se découvre un héritier. Le grand espoir Thiem, qui glanera ses plus beaux succès sur dur, apparaît alors comme un spécialiste de la terre battue. Il remporte ses premiers titres sur ocre, s’affirme comme le successeur potentiel de Rafael Nadal et gravit les échelons du classement ATP.

Un champion crescendo

Durant la deuxième moitié des années 2010, la progression de Dominic Thiem en matière de résultats est éloquente tant elle paraît programmée, millimétrée. Au fil des ans, le champion s’avance crescendo vers son premier titre majeur :

  • 2015 : Premier titre en ATP 250
  • 2016 : Premier titre en ATP 500 / Dernière finale perdue en ATP 250
  • 2017 : Première finale en Masters 1000 / Dernière finale perdue en ATP 500
  • 2018 : Première finale en Grand Chelem / Dernière finale perdue en Masters 1000
  • 2019 : Premier titre en Masters 1000 / Première finale aux ATP Finals
  • 2020 : Premier titre en Grand Chelem / Deuxième finale aux ATP Finals.

Hercule à New York

La carrière de Dominic Thiem connaît son apogée sur surface dure. Après un premier titre en Masters 1000 à Indian Wells, en 2019, et une finale disputée à l’Open d’Australie, en 2020, où il échoue de peu face à Novak Djokovic, le joueur autrichien remporte son premier tournoi du Grand Chelem à l’US Open la même année. Tête de série numéro 2, grand favori du majeur new-yorkais au fil des tours, il terrasse Alexander Zverev dans le match de la peur. Mené deux manches à zéro, le Hercule de Wiener Neustadt trouve les ressources pour s’imposer au jeu décisif du cinquième set. Néanmoins, la consécration tant attendue, étouffée par la crise du Covid-19, se déroule dans une atmosphère étrange. À vaincre sans public, on triomphe sans hourras.

Dominic Sisyphe

Terrien battu

Trois semaines seulement après son premier titre en Grand Chelem, Dominic Thiem ne peut enchaîner avec un nouveau couronnement à Roland-Garros, repositionné en automne. Le successeur désigné de Nadal est en effet battu par son ami Diego Schwartzman en quart de finale, après deux défaites successives en finale face à Rafa. Champion paradoxal, Thiem est un terrien d’exception n’ayant jamais remporté de titre d’envergure sur sa surface de prédilection. Son palmarès ne comporte en effet « que » deux succès en ATP 500 sur ocre, à Rio de Janeiro en 2017 et à Barcelone en 2019.

Colosse au poignet d’argile

Après une deuxième et douloureuse défaite sur le fil en finale des ATP Finals, Dominic Thiem entame une chute vertigineuse à l’orée de 2021. Sèchement éliminé par Grigor Dimitrov à l’Open d’Australie, Thiem termine sa saison dès le mois de juin en raison d’une blessure au poignet. Dans un sport où physique et mental sont intimement liés, ce coup d’arrêt n’est pas sans rappeler le burn-out de Djokovic entre 2016 et 2018. Le colosse au poignet d’argile fait un retour guère couronné de succès en 2022 et plonge au classement.

Le supplice de Sisyphe

Durant son glorieux quinquennat, Dominic Thiem a su dominer Roger Federer (5 victoires à 2) et résister à Nadal (6-9) tout comme à Djokovic (5-7). Par ces performances notables, Thiem s’inscrit dans la lignée de l’un des rares joueurs à avoir pu contester le Big 3, Stan Wawrinka, avec lequel il affiche quelques similitudes : élégance brutale, revers à une main monumental. C’est un Dominator fantomatique qui a été écrasé en finale du Challenger 90 de Rennes par Ugo Humbert en 2022 et de l’ATP 250 de Kitzbühel par Sebastian Baez en 2023. La saison dernière a tourné au supplice pour Sisyphe qui est apparu meurtri lors du tournoi de Miami et n’est pas parvenu à retrouver son statut. À trente ans révolus, tandis que d’autres prétendants l’ont supplanté, peut-il refaire surface ?