7 ans sous le joug de Franck Mc Court, 5 entraîneurs différents. Et depuis Rudi Garcia (2016-2019), aucun n’a duré plus de deux saisons consécutives sur le banc olympien. Igor Tudor, imposant et charismatique personnage, n’a pas tenu la marée non plus. L’ancien du Hellas Vérone a passé la saison entière à faire taire le Vélodrome et tenter d’inverser la tendance de la vox populi marseillaise pour au final rendre les armes malgré une saison loin d’être catastrophique mais avec comme épilogue une deuxième place abandonnée au RC Lens, une élimination précoce en Ligue des champions et une déroute en coupe de France face à Annecy, si on prend en compte les trois défaites en quatre matchs pour clôturer l’exercice.

Aujourd’hui, le club phocéen a, sportivement, son avenir européen incertain. Le troisième strapontin lui permet un accessit pour la plus grande des coupes d’Europe mais il faudra, pour ce faire, passer deux tours préliminaires, soit quatre rencontres en plein mois d’août à une période où le championnat aura repris ses droits et le mercato battra son plein. Pas la plus simple des manières de lancer l’exercice 2023-2024 dans les meilleures conditions. Alors que le club a toujours été gangrené par l’instabilité et que l’arrivée de l’américain n’a pas arrangé le problème (loin s’en faut), la politique du président Pablo Longoria - nommé par Jacques Henri Eyraud avant son départ - serait-t-elle à remettre en cause ? Tentative de réponse.

La paire Longoria - Ribalta, l’espagnolisation de l’organigramme

L’un est le président du club, l’autre directeur du football et intronisé l’année dernière pratiquement jour pour jour. C’est ce duo qui fait actuellement tourner l’Olympique de Marseille avec comme troisième homme - moins connu néanmoins - Pedro Iriondo, ami de longue date de Longoria et arrivé ces derniers mois comme directeur de la stratégie du club, sorte de numéro 2 du boss marseillais. A eux trois, ils ont choisi Marcelino Toral pour remplacer Tudor. Choix basé sur les goûts de Longoria mais également leur vécu (les deux hommes se connaissent depuis des années). Le début d’une longue collaboration ? Difficile à croire… Car entre les retours de prêts et bons de sortie, l’effectif olympien va évidemment être encore chamboulé. On annonce déjà neuf départs pour autant d’arrivées et l’impression de revoir le même manège année après année. Mais ce qui rassemble les trois protagonistes du board ciel et blanc, c’est surtout la faculté à dénicher les futurs talents. Ce à quoi va s’appliquer Javier Ribalta, un an après avoir signé Alexis Sanchez comme tête de gondole de l’équipe et qu’il espère bien conserver.

Une politique interne contestée

Un temps adoubé par une grande partie des supporters, la gestion sportive de Longoria est désormais lourdement remise en question. Chahuté par quelques-uns des leaders de groupes olympiens en marge du déplacement à Ajaccio pour le compte de la dernière journée de championnat et sommé même par certains de « préparer ses bagages », le taulier de l’OM ne part pas forcément sous les meilleures auspices à l’aune de la nouvelle saison. Certains journalistes comme Grégory Schneider (l’Equipe 21) sont même les premiers à remettre publiquement en cause sa politique interne. « C'est quoi être OM compatible ? Il faut être Longoria compatible, donc tu ne t'occupes pas des transferts. Une fois que t'as les joueurs, ça dure un an, tu revends 13 joueurs et tu en achètes 14. Mais tu peux vite te casser la gueule." Discours clair et recevable, tant en cette fin de mois de juin et avant la reprise de l’entrainement collectif, l’heure est au questionnement. Le seul départ acté parmi l’effectif est celui d’Arkadiuz (Arek) Milik, ayant signé définitivement à la Juventus pour 6,5 millions, un an après y avoir été prêté. Le polonais étant le seul à avoir le profil du vrai numéro neuf tant cherché par le club (Bamba Dieng ayant été vendu à Lorient), le fait est que l’expression « un pas en avant, trois en arrière » n’a jamais semblé aussi vraie et on peut donc, à juste titre, comprendre la colère des supporters.

Marcelino, sacré expérience en Liga mais méconnu

L’heureux élu est donc une vieille connaissance de l’actuel président de l’OM. Et pour cause : Longoria a commencé sa carrière de scout en étant salarié de l’entreprise qui gérait les intérêts de l’ex-entraineur de Valence. C’est là que l’homme fort du club phocéen a tout appris et a pu parfaire sa connaissance du football, admettant admirer la philosophie du néo-marseillais de 57 ans. Seulement, si Marcelino a sa petite réputation en Espagne, il n’a à son actif que deux épopées européennes et n’a jamais coaché hors de la péninsule. Ses parcours avec Villarreal (2016) et donc Valence (2019), en Ligue Europa sont à noter. Mais si on regarde son palmarès à l’échelon supérieur, c’est à dire en C1, le constat est implacable : une seule participation pour une élimination au premier tour avec le club ché. Son plafond de verre se situe donc là, alors qu’on va lui demander de qualifier Marseille pour ladite compétition et d’y franchir à minima la phase de poule, ce qu’il n’a jamais su faire en plus de vingt ans de carrière. La question se pose alors : Longoria a t-il misé sur le bon cheval ? Rien n’est moins sûr…

Séville, l’exemple type à suivre ?

Le trio semble aujourd’hui aller dans le sens de ce qui se pratique au FC Séville, qui vient de remporter sa septième Ligue Europa en battant la Roma de José Mourinho en finale, ce qui fait du club andalou le spécialiste de l’épreuve. Bâti depuis 2007 pour remporter ce genre de titre, changeant successivement d'entraîneurs et de joueurs mais conservant son ADN, ce modèle est-il pour autant importable à Marseille, qui reste sur trois finales européennes perdues depuis 1999 et n’a plus goûté aux joies d’un tel sacre depuis 1993 ? Cette énième interrogation trouvera peut-être une réponse le jour où un projet à long terme naîtra dans la cité phocéenne. En attendant, Longoria donne plus l’impression de faire dans le copinage que dans un réel souci de construire grand et voir loin.