Portals to unwritten time part de ce postulat : l’art peut constituer un seuil à travers le temps. Les œuvres nous ouvrent de nouveaux portails vers l’esprit, la mémoire, les mythes et la réflexion philosophique.

Les artistes qui participent à l’exposition ne se contentent pas de regar- der vers l’avenir, mais se penchent aussi sur l’histoire parallèle, sur les profondeurs du corps et sur l’inconnu au-dehors. C’est Hilma af Klint qui a inspiré ce voyage et nous guide tout du long. Pour elle, le temps ne s’écoulait pas de manière linéaire mais formait une spirale mystique, symbolique, à travers des royaumes cachés. Elle imaginait ses toiles comme des outils, des diagrammes et des portails, des structures qui un jour s’adresseraient à un avenir qui leur serait plus réceptif.

Dans ce contexte, le portail est à la fois métaphore et méthode. C’est un seuil visuel et conceptuel, une ouverture symbolique à travers laquelle de nouvelles formes peuvent émerger. Cette connaissance n’est pas linéaire, elle est incarnée et très souvent poétique ; elle provient de l’intuition, de la mémoire et de l’invisible.

L’exposition réunit une constellation d’artistes qui rendent ce seuil visible, chacun et chacune à leur manière.

Tuan Andrew Nguyen présente Tear et la Kinetic bamboo curtain sculpture, qui explorent des royaumes temporels, politiques et matériels par le biais du mouvement et de la superposition d’images, nous montrant la mémoire comme à la fois fragile et dynamique–un lieu de résistance, de traumatisme et de guérison, où les structures en bambou incarnent la contradiction et invitent à la réflexion sur des récits de conflit et de survie.

Avec Venus rising d’Isabelle Albuquerque (2024), féminité mythique et intelligence érotique émergent de formes sculpturales étranges et surréalistes. L’œuvre devient un portail sensuel, qui relie l’intime et la figure archétypale, au sein duquel le corps est à la fois seuil et vaisseau mythique.

Les céramiques rituelles de Chiara Camoni sont chargées d’une sensi- bilité animale qui dissout les frontières entre objet et esprit. Dans cette exposition, deux immenses sculptures figurent un portail physique entre le terrestre et l’invisible.

Anna Perach fusionne le rêve et l’histoire dans ses travaux atmosphé- riques, où intimité et rupture se confrontent. Dans Dismembered Venus et Gateway (2023), des corps brisés et des structures silencieuses font office de passages vers le désir, le mythe et le langage partiel du subconscient.

Tecla Tofano, voix féministe incontournable d’Amérique latine, teinte les thèmes du genre et des rituels d’un humour matériel féroce, qui ouvre un portail vers des passés féministes résonnant encore aujourd’hui.

Emanuel de Carvalho nous apparaît dans un doux écho, comme réglé sur des fréquences au-delà du champ de notre perception. Le portrait, tout comme la pratique de l’artiste, devient un portail vers l’harmonisation, dans lequel la vision n’est pas une simple réception passive mais un déploiement métaphysique actif.

Tarek Lakhrissi présente des œuvres sculpturales qui sont des seuils invitant le public à explorer des futurs queer. Ses sculptures en verre soufflé évoquent à la fois sensualité et résistance, transformant des formes du quotidien en symboles de désir et d’appartenance.

Emma Prempeh peint quant à elle avec une tendresse spectrale, superposant mémoire et espace dans des gestes qui semblent anciens et guidés par la spiritualité. Cette œuvre devient un portail vers le désir et la connexion, une fenêtre par laquelle l’amour, auparavant distant et muet, se fraie un chemin vers un avenir commun.

Le diptyque de Kiki Xuebing Wang se déploie comme une marée émotionnelle—tendre, insaisissable et doucement rayonnante. Des vagues de couleurs et des formes flottantes portent le poids de rêves à demi oubliés, où les branches s’étendent et les lunes planent telles des émotions à peine accessibles. Son œuvre devient un portail vers l’intime et l’indicible—un espace où la mémoire respire et où le cœur perçoit ce que l’œil ne peut voir.

Norberto Spina nous révèle des mondes très texturés et nuancés, par le biais de surfaces aux couches multiples qui retiennent le temps à la manière de sédiments. Ses peintures nous transportent vers des souve- nirs en mutation et des histoires cachées, pour nous encourager à explorer les croisements fragiles entre les récits personnels et collectifs.

Beatrice Arraes joue avec les textures, les formes organiques et des références corporelles pour faire apparaître des seuils entre la nature, le rituel et la psyché. Ses œuvres déploient le destin et l’imagination, le jeu y devient prophétie et la forme y devient portail.

Les œuvres sur papier d’Alessandro Twombly sont pleines d’une intensité spirituelle, rappelant des formes florales et une énergie cosmique–des portails énergétiques où s’entremêlent la nature et le sublime.

La pratique de Samuel Sarmiento fait converger la cosmologie et les mythes pour nous proposer des mondes symboliques, où le temps cyclique et les mythes culturels ouvrent des portails vers les origines, l’esprit et l’imagination débridée.

Theresa Weber crée des environnements riches et chargés de symboles qui agissent comme des archives sacrées. Son travail associe l’iconographie de la diaspora africaine avec la science, formant ainsi des espaces rituels où des énergies ancestrales, futuristes et mythiques confluent, portails propices au souvenir et à la projection.

Ces œuvres invitent le public à faire une pause, à écouter, à imaginer que le temps n’est pas encore tout à fait écrit, et que la compréhension est toujours en cours. Elles appellent à vivre l’instant présent, à s’ouvrir, à faire confiance. Elles ne font pas de déclarations, elles ouvrent un passage et constituent des seuils vers la réflexion, l’harmonisation et la possibilité d’approfondir ses perspectives.