A 44 ans, Jitish Kallat compte parmi les voix indiennes les plus reconnues sur la scène internationale. Son travail, multiforme et poétique se déploie depuis 20 ans comme une ‘cartographie imaginaire’ qui connecte le quotidien et le cosmique. Phase Transition marque le retour de l’artiste à la peinture, autour de questions liées à l’évolution, l’entropie et la disparition. Jitish Kallat propose une célébration de la vie en peinture, exprimant dans le même temps l’anxiété inhérente au spectacle du monde contemporain, dont il traduit les crises en un riche univers symbolique.

Phase Transition est scandée par la série Palindrome/Anagram, un nouvel ensemble de toiles hybrides de grand format, composées comme des cadavres exquis, mêlant acrylique, aquarelle, crayon, plâtre et laque. Elles développent des formes en mutation où une image en amène une autre dans un déroulement ludique telle une partition musicale. Ainsi se connectent éléments géométriques, géologiques ou botaniques : arbre, coquille, molécule… Tous les motifs et les flux participent d’une même circulation d’énergie sur la toile, en une nébuleuse plus narrative que purement conceptuelle.

Comme l’explique l’artiste, il s’est imposé une restriction, une privation artificielle de peinture pendant près de 5 ans. A partir de 2016, il ressentit le besoin de revenir à ce medium pour affronter le plus grand défi qu’elle offre : la liberté. Palindrome/Anagram participe d’une nécessité intérieure autant que de la volonté d’aborder les urgences du monde extérieur.

Dans l’espace de la galerie, Jitish Kallat a également installé plusieurs sculptures-bancs, comme des plateformes d’échange possible entre les spectateurs, offrant un nouveau point de vue sur les peintures. Les bancs prennent la forme de deux aiguilles, celles de la Doomsday Clock, une horloge conceptuelle mise au point pendant la Guerre Froide par des scientifiques américains, qui utilise l’analogie du décompte vers minuit – symboliquement, l’apocalypse - pour dénoncer les menaces pesant sur l’humanité.

Au sous-sol le spectateur découvre la genèse de ce nouveau travail : les dessins Rain Studies réalisés à partir de gouttes de pluie, la sculpture Covariance (Sacred Geometry) sorte de météorite couverte d’yeux d’animaux, le triptyque photographique Sightings où la surface d’un fruit se transforme en une supernova, créant une tension entre le cosmique et le microscopique.