Galleria Continua / Paris Matignon consacre une exposition à Christian Bérard, conçue par Carlo Falciani avec la complicité de Bruno Botticelli (Botticelli Antichità). Fidèle à son programme mettant en résonance l’art ancien, moderne et contemporain, la galerie met ici en lumière la figure de Christian Bérard, acteur incontournable de la scène artistique française des années 1930 et 1940. Ce projet, mené en collaboration avec Botticelli Antichità, trouve son origine dans la redécouverte d’une importante sculpture baroque, admirée par Bérard qui la percevait presque comme son double. Des photographies emblématiques d’Herbert List témoignent de cet attachement, montrant l’artiste enlacé à la monumentale œuvre en marbre, comme devant un miroir reflétant son visage et sa posture.
Christian Bérard (Paris, 1902-1949) occupe une place singulière sur la scène artistique parisienne par la diversité de ses talents et l’ampleur de ses collaborations dans de multiples disciplines. Peintre, décorateur de théâtre et de cinéma, scénographe et illustrateur de mode, il a marqué deux des décennies les plus raffinées et sophistiquées de l’art français et européen par un style novateur, alliant une élégance rare à une attitude résolument anticonformiste. Dès 1926, sa peinture retient l’attention de Jean Cocteau, qui le qualifie, selon Boris Kochno, d’«artiste révolutionnaire dont les peintures humanistes annonçaient la fin de la période du cubisme devenu purement décoratif». Mais l’expression créative de Bérard dépasse largement le cadre pictural: il collabore aux décors et aux mises en scène des Ballets Russes, conçoit en 1930 les décors et costumes de La voix humaine de Jean Cocteau, puis poursuit ce travail en 1948 pour le film L’amore de Roberto Rossellini, adaptation de la même pièce avec Anna Magnani dans le rôle principal. Parmi les nombreuses scénographies réalisées par Christian Bérard, celle de La folle de chaillot de Jean Giraudoux demeure particulièrement marquante. Au cinéma, Jean Cocteau lui confie la direction artistique de La belle et la bête (1946), où l’influence surréaliste de son univers s’exprime avec une intensité renouvelée. Il n’est pas nécessaire de retracer ici la biographie de Bérard, déjà largement documentée dans des monographies de référence, notamment celle dirigée par Boris Kochno avec des contributions de Jean Clair et Edmond Charles-Roux, ou encore mise en lumière par la grande exposition Christian Bérard, au théâtre de la vie, présentée à Évian en 2022.
En écho à l’œuvre de Christian Bérard et aux projets auxquels il prit part, est née l’idée de réunir, autour du buste de marbre qui lui appartint, des œuvres d’artistes contemporains. Leurs pratiques explorent des thématiques aussi diverses que la liberté individuelle, la question des identités qu’elles soient nobles, grotesques ou monstrueuses, la sensualité, la danse et l’écologie. Elles investissent également l’espace de la galerie pour le transformer en un environnement immersif, où émotions, humanité et raffinement formel se combinent en une vision utopique. Au 108 rue du Faubourg Saint-Honoré, la sculpture ancienne ayant appartenu à Christian Bérard sera présentée aux côtés de deux autres têtes expressives - l’une du XVIe siècle, l’autre du début du XVe siècle — chacune incarnant une facette de l’humanité et rappelant les fractures du temps. Les œuvres graphiques de Bérard dialogueront avec des créations inédites de Juan Araujo spécialement conçues pour l’exposition, tandis qu’une œuvre de Jean Cocteau entrera en résonance avec les sculptures de Jonathas de Andrade et l’univers de JR. Enfin, les maquettes de Bérard feront écho aux œuvres d’Eva Jospin, soulignant la contemporanéité de son univers et l’influence toujours vive de son travail sur les pratiques artistiques actuelles.












