Ces derniers mois, le président français a émis des critiques à l’égard du système éducatif national.

C’est lors d’un déplacement à Marseille en juin, qu’Emmanuel Macron a ressuscité le débat sur le temps scolaire annuel en France. Le président de la République a déclaré que les écoliers français ont trop de vacances scolaires, ce qui a pour effet d’accroître les inégalités. Cette déclaration fait écho aux propos tenus quelques semaines plus tôt lors d’une réunion politique à Bordeaux par son ancien Premier ministre et allié politique Édouard Phillipe, qui a exprimé des critiques similaires sur le système scolaire national. Emmanuel Macron a également mis en avant les journées d’écoles fatigantes infligées aux élèves. Les citriques du chef d’État sont-elles justifiées ?

Des études conduites en 2021 par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) viennent confirmer ces propos. Une comparaison du temps des grandes vacances scolaires dans 36 des 38 pays de l’organisation, nous montre pourtant que seul 9 de ces pays ont des vacances scolaires plus courtes en été que la France et ses 8,2 semaines de grandes vacances, ce qui semble aller à l’encontre de l’observation du chef d’État. Néanmoins, la différence avec les autres systèmes scolaires s’exprime lorsque l’on prend en compte le total des vacances scolaires durant l’année. Sur les 36 pays de l’étude, seuls 6 offrent plus de temps de vacances que la France avec ses 16,4 semaines de vacances par année scolaire. En effet, La France est un des seuls pays à accorder 4 périodes de vacances de 2 semaines pendant l’année. Outre-manche, les seules vacances de 2 semaines ont lieu à Noël. Les autres pauses durent généralement 1 semaine ou moins. Cas similaire en Allemagne où les écoliers ont 2 périodes de vacances de 2 semaines, puis des périodes de repos plus courtes. Ces longues périodes de vacances sont souvent critiquées par des observateurs, intervenant parfois après seulement 5 ou 6 semaines de cours et qui ne laissent pas aux élèves le temps de consolider certaines connaissances. S’ajoute à cela la perturbation régulière des rythmes biologiques, car beaucoup modifient leurs horaires en vacances et prennent quelques jours à se recaler.

Ces longues périodes de vacances sont-elles créatrices d’inégalités ?

Un rapport du programme international de l’OCDE, datant de 2018, enregistre une différence de 107 points entre les acquis des élèves issus de milieux favorisés et les autres, au sein de l’hexagone. La moyenne des pays de l’organisation est de 89 points, montrant qu’en France, la relation entre le statut socio-économique et les acquis des élèves est forte. Une partie de ces différences se creuse lors de la pause estivale comme le rapporte une étude de l’éducation nationale conduite en avril 2023. Celles-ci portent sur les compétences en mathématiques et en français des élèves de CP avant et après les grandes vacances. Les résultats montrent que les écarts de performances augmentent dans tous les domaines au détriment des élèves appartenant au réseau d’éducation prioritaire. Les élèves scolarisés dans le secteur public, hors des zones d’éducations prioritaires, accroissent leur avance en mathématiques de 18% entre fin juin et début septembre sur leurs camarades en zones d’éducations prioritaires. Cet accroissement est porté à 28% pour les compétences en français sur la même période.

Cela s’explique par la différence d’opportunités présentées aux enfants venant de ces deux milieux distincts. Certains partent en vacances, parfois même à l’étranger, et ont accès à des visites de musées, des ateliers, et à d’autres types d’activités. Ce n’est généralement pas le cas pour les enfants issus de familles défavorisées qui sont souvent contraints de passer beaucoup de temps derrière leurs écrans face au manque d’activités culturelles proposées. De plus, comme le rappelle l’OCDE, la profession des parents à un impact sur l’aide scolaire qu’ils vont pouvoir plus ou moins fournir à leurs enfants. Les écoliers issus de milieux favorisés vont plus souvent être accompagnés par des parents ayant suivi de longues études, capables de les aider grâce à leurs connaissances, et même parfois financièrement en leur permettant de suivre des cours particuliers. Cet argument a d’ailleurs été repris récemment par le président français, qui a mis sur la table l’option de permettre aux élèves les plus en difficultés de faire leur rentrée dès le 20 août.

Au-delà des périodes de vacances, le chef d’État déplore aussi la fatigue des écoliers à la fin de leurs journées d’études souvent surchargées. Cette observation est confirmée par L’OCDE qui indique que les collégiens français sont 7e sur 36 pays en nombre total d’heures d’enseignement au collège, malgré de longues périodes de vacances scolaires. En effet, les journées des écoliers français sont souvent exigeantes jusqu’en fin d’après-midi, là où d’autres pays cessent les cours magistraux plus tôt dans la journée, pour permettre aux élèves de se consacrer à des activités extra scolaires culturelles ou sportives. C’est le cas en Allemagne, pays souvent tout en haut des classements des systèmes scolaires, où les élèves de primaire arrêtent les cours classiques vers 12h30-13h pour se consacrer à leurs devoirs ou à des activités socio-culturelles.

Le président français a aussi abordé l’éventualité d’une réforme des programmes scolaires ainsi que la possible revalorisation des enseignants lors d’une interview accordée au Point en août. On attend donc de voir les premières discussions de modifications du système éducatif français qui devraient commencer prochainement.