La Corderie Royale de Rochefort raconte notre histoire. Ancrée dans notre patrimoine, elle est la mémoire de ce que nos ancêtres ont jadis construit pour conquérir les mers. Elle est le témoin de l’intelligence des hommes et de l’évolution de l’ingénierie. Par son existence quasi immuable au fil des siècles, la Corderie Royale est la survivance du passé Français dans tout ce qu’il a de plus beau et de plus glorieux.

Découverte

La Corderie Royale est installée au bord des méandres de la Charente à Rochefort. Sa position n’est pas anodine puisque le but était de rejoindre l’océan Atlantique et que sa position, difficile d’accès rendait quasiment impossible la venue d’éventuels envahisseurs. Elle fut construite sur un sol vaseux ce qui engendra doute auprès des instigateurs du projet. C’est en 1666 que débutent les travaux. La Corderie Royale, voulue par Louis XIV, fabriquera deux siècles durant, les cordages des grands voiliers de la Marine royale. Elle fut incendiée durant la Seconde Guerre mondiale puis abandonnée avant de renaître de ses cendres et classée aux Monuments Historiques. Aujourd’hui, différentes structures l’habitent : il y a le Centre International de la Mer, chargé de valoriser ce patrimoine, une Chambre de Commerce et d’Industrie, une Médiathèque, le Conservatoire du Littoral et la Ligue pour la Protection des Oiseaux.

Plongée au cœur du bâtiment

L’apparence du bâtiment impressionne, c’est une véritable curiosité architecturale. Sa longueur approximative est de plus de 300 mètres. Cette longueur était nécessaire afin de réaliser les cordages en chanvre. Arnaud Dautricourt, aujourd’hui à la tête du service production culturelle au sein du Centre International de la Mer de la Corderie Royale de Rochefort nous explique : " Le cordage est fait en chanvre. C’était la seule fibre utilisée. C’est une fibre végétale produite dans tous les bassins-versants de France notamment sur la Loire, la Garonne et le Rhône. Cette plante n’a pas besoin de beaucoup d’eau par contre elle a besoin d’être dégradée dans ce milieu pour que l’on extraie la fibre de sa coque. Cette technique est aujourd’hui complètement interdite car c’est une dégradation bactérienne et cette concentration de bactéries dans l’eau poserait des désagréments. En revanche, il existe d’autres contrées dans le monde où cette technique est encore utilisée. La demande en chanvre était extrêmement forte puisqu’il fallait approvisionner Brest, Toulon, Lorient, Le Havre, Dunkerque. Le Royaume de France va inciter les zones rurales à planter du chanvre. Si la saison est mauvaise, il se tourne alors vers le marché international du chanvre qui se situe à Riga pour négocier de très gros volumes. Ces volumes arriveront à Dunkerque puis seront diffusés sur l’ensemble des arsenaux. Ce sont les premières centrales d’achats au début du 18ème siècle. "

La Corderie employait des enfants âgés de douze-treize ans. Ils découvraient le métier au fur et à mesure de leur apprentissage afin de devenir ouvrier et dans l’espoir d’être un jour maître. Chaque atelier était un lieu de formation. " On trouvait de nombreux ouvriers à la Corderie car tout s’effectuait à la main " indique Arnaud Dautricourt. " Ce savoir-faire est très empirique, il faudra attendre le 18ème siècle avant d’obtenir des écrits sur l’art de fabriquer des cordages ". Au fil de la visite de cet ensemble muséal, nous découvrons les différents ingénieurs qui ont innové dans ce domaine et qui ont participé aux avancées de la Corderie. Le cordage le plus fort et le plus résistant est celui qui soutient l’ancre. En plus de cette fonction, il doit également résister à la tension du bateau sur le point d’ancrage. " Dans toute la littérature, lorsque l’on dit " Larguez les amarres " et que le bateau s’en va ce n’est pas vrai, confie Arnaud. Le cordage est si lourd, qu’il faut beaucoup, beaucoup de temps avant de pouvoir le remonter entièrement. Si l’urgence est absolue est qu’il faut partir immédiatement, le seul moyen restant est de couper le cordage à la hache. Le naufrage de la Pérouse serait dû à cela. "

L’histoire de la Corderie Royale est mise en beauté par le Centre International de la Mer dont le Président est Henri Jobbé-Duvalle. Nous plongeons au milieu d’un océan (ludique) de culture. On a envie d’y rester et de devenir gabier !