Un scintillement perce la nuit noire. À quelques minutes d’intervalle, il revient et balaie la surface sombre de l’eau. Du haut du phare, le large faisceau lumineux éclaire la mer. Ce signal guide les marins depuis plus de 200 ans. Cette lumière est un repère précieux pour les navigateurs qui parcourent les mers du monde. Savez-vous à qui l’on doit ce système d’éclairage révolutionnaire ?

Augustin Fresnel. Ce nom ne vous dit peut-être rien ? Avec plusieurs casquettes, le physicien, ingénieur et architecte s’est inspiré des recherches de ses prédécesseurs pour les réadapter et améliorer le système d’éclairage des phares. Il a inventé la lentille à échelons dite « lentille de Fresnel ». Elle équipe aujourd’hui la plupart des phares dans le monde. C’est en juillet 1823 qu’il installe le premier appareil lenticulaire au sommet du phare de Cordouan.

Des premiers feux …

L’histoire des phares est liée aux aventures technologiques touchant les systèmes d’éclairage. Au départ, les sentinelles sont éclairées par des feux de bois puis de charbon. Cela ne génère que de pâles falots. La brume, le pire ennemi des marins, ou encore la pluie et le vent, viennent ternir l’éclat des feux. A la fin du 17ème siècle, les foyers brûlants sont couverts d’un lanterneau que l’on va vitrer et ventiler. Malgré tout, les fumées noires encrassent les vitraux. Le système s’améliore avec l’apparition de grandes lanternes sur un muret de pierres cylindriques. Différents carburants, à base d’huiles animales ou végétales, sont utilisés pour alimenter les lampes. Le retour au charbon est fortement réclamé par les marins car les feux éclairent mieux. Des premiers tâtonnements apparaissent avec la Compagnie Tourtille-Sangrain qui inaugure les premiers réflecteurs composés de feuilles de cuivre que l’on a argentées pour réfléchir la lumière. La mèche des lampes à huile se perfectionne aussi pour fumer moins et éclairer davantage.

… aux optiques de Fresnel

Avant tout, un phare doit pouvoir être vu à une certaine distance par les marins et calculée avant sa construction. Augustin Fresnel, un inventeur ingénieux, s’est penché sur la problématique avec pour objectif : améliorer le système d’éclairage existant avec l’émergence de nouvelles technologies de l’époque. Le Normand a fait ses études à L’École Polytechnique et L’École nationale des Ponts et Chaussées. Il est ensuite devenu premier secrétaire de la Commission des Phares. À l’époque, le physicien a une idée lumineuse : installer de grands panneaux lenticulaires dont le nombre ira grandissant à l’intérieur en haut des phares. Constitués de plusieurs pièces de verre collées les unes aux autres et disposées en anneaux autour d’un tambour, ces panneaux améliorent le système d’éclairage. Augustin Fresnel installe son premier appareil, fabriqué par l’opticien Soleil (ça ne s’invente pas !) au phare de Cordouan en 1823.

Au fil des années, le savant va constamment améliorer son système en installant des petites lentilles inclinées par-dessus le tambour. Il inventera aussi les anneaux de verre catadrioptriques qui associent réflexion et réfraction de la lumière. Les grands appareils lenticulaires de Fresnel vont s’exporter sur tous les rivages. L’éclat et les intervalles seront modifiés pour répondre aux besoins de la navigation. À l’approche des côtes, les marins et plaisanciers comptent le nombre d’éclats qui percent depuis la lanterne des phares dans la nuit pour se repérer.

La fin des gardiens de phares

Les gardiens de phares assurent l’allumage et la maintenance des sentinelles appelées aussi « les paradis et les enfers » selon leur positionnement géographique. Les phares dits enfers sont érigés en pleine mer, au milieu de récifs et des courants. Tandis que les paradis veillent sur les marins depuis la terre. La fée électricité fait son apparition dans les premières tours. L’électrification marque une nouvelle étape. Et un premier pas vers l’automatisation des phares qui s’est depuis généralisée. Condamnant aussi la fin du métier de gardien de phares. Désertés par ces hommes courageux, les phares français sont automatisés et continuent de mener leur mission de signalisation optique.