Essence et expression, voici les notes dominantes du bouquet de chefs-d’œuvre du XXe siècle que Jaime Botín a généreusement cédés à la Fondation Botín, dont il est membre du patronat, pour être en permanence exposés au Centro Botín.

Il s’agit de huit toiles à forte valeur plastique d’artistes prestigieux comme Francis Bacon, Juan Gris, Francisco Gutiérrez Cossío, José Gutiérrez Solana, Henri Matisse, Isidre Nonell, Daniel Vázquez Díaz et Joaquín Sorolla. Tous ont exercé leur activité au début du XXe siècle en pleine éclosion des avant-gardes : une période complexe, de rupture avec la tradition, irriguée par toutes sortes de nouveaux courants et autres mouvements esthétiques qui se chevauchent.

Ce groupe de tableaux présente trois traits communs : une expression maximale au travers de la couleur et de la lumière, la figure comme moyen de communication et fil conducteur et, enfin, le recours au portrait, genre qui constitue l’essence de l’ensemble.

Self Portrait with Injured Eye est un autoportrait que Francis Bacon a réalisé en 1972, quelques mois après le suicide de son modèle et amant, George Dyer. La peinture exprime la solitude, la douleur et le déchirement de l’artiste face à cette perte. Elle semble aussi exprimer sa personnalité autodestructrice avec cette image inquiétante et violente et ce visage décomposé en formes géométriques qui créent un effet très dynamique.

En 1918, en pleine maturité artistique, Juan Gris aborde cet Arlequin dans lequel il synthétise les formes et réduit les motifs représentés dans une composition simple, qui présente la figure humaine au moyen de plans entrelacés. L’artiste utilise également le personnage pour mettre en valeur la couleur, toujours apprêtée en dialogue avec le bleu.

Francisco Gutiérrez Cossío est l’un des peintres les plus importants d’Espagne. Dans Portrait de ma mère, peint en 1942, il capture l’esprit serein et aimable du personnage dans une image qui, malgré la forte construction des plans, défait les contours en donnant la priorité à la courbe. Privilégiant les atmosphères voilées, il recouvre la surface de la toile d’une marbrure blanche, très caractéristique de son travail.

Dans Le fabricant de masques, José Gutiérrez Solana peint son ami Emeterio dans son atelier de Vistillas à Madrid. L’artiste nous montre sa personnalité dans une composition symétrique aux espaces parfaitement équilibrés. Malgré la noirceur de l’environnement, l’œuvre, exécutée dans les dernières années de sa production, est une toile colorée qui dégage une atmosphère unique.

Dans Femme espagnole, Henri Matisse se remémore un voyage effectué en Espagne en 1911 pour visiter le Prado et connaître l’Andalousie. Il en revient avec une valise lourde de brocards et de mantillas et une palette enrichie d’une puissante lumière, qui se traduit par des couleurs limpides et ouvertes, sans mélange de clairs-obscurs. Cette influence se traduit par un style plus léger, subtil et harmonieux.

En 1907, Isidre Nonell peint Figure à micorps, dans laquelle il abandonne la figure de la gitane comme personnage principal pour des femmes au teint clair, plus paisibles, posées et mélancoliques.

L’artiste choisit la couleur comme unique élément pour modeler la figure, superposant les blancs et les bleus en contraste avec les noires chevelures de ses modèles.

Au Bain de Joaquín Sorolla est une œuvre d’une grande sensibilité et délicatesse qui a été peinte à l’été 1908 sur une plage de Valence. Elle se distingue par la délicatesse de sa lumière, sa palette restreinte, ses puissants coups de pinceau et ses brillants contrastes.

Daniel Vázquez Díaz est l’un des plus grands représentants de ce genre. Femme en rouge est une toile peinte en 1931, alors que l’artiste était déjà à Madrid. Elle se caractérise par l’expression et le sentiment qu’exprime le personnage sur son visage et l’essence comme reflet de l’esprit qui transcende l’expression même.

Un air sombre et nostalgique survole toutes les peintures, comme si elles étaient enveloppées d’un grand voile transparent de mélancolie.