Gap in the clouds marque un tournant discret mais affirmé dans le travail d’Henrik Eiben, qui dévoile ici une série inédite de sculptures où formes, matières et couleurs s’accordent dans une tension maîtrisée entre exactitude et légèreté.

Verre teinté, acier poli, bois travaillé et textile viennent s’imbriquer avec minutie, composant des volumes d’une apparente simplicité. Derrière l’apparente pureté des lignes se joue un travail d’orfèvre, précis et intuitif à la fois. Les éléments s’ajustent au millimètre, mais quelque chose résiste à la perfection : une inclinaison trop humaine, une courbe inattendue, une tension entre deux matières que rien ne semblait appeler à coexister. Le verre capte la lumière puis la rejette ; le métal réfléchit une teinte qui n’est pas la sienne. Rien n’est figé, tout est transition.

S’il fait écho à certaines références du minimalisme (on pense à Fred Sandback ou Donald Judd), Eiben s’en écarte subtilement. Là où le minimalisme cherche la neutralité, il introduit du décalage, du rythme, de la nuance. La forme devient un outil d’exploration visuelle plus qu’un objet en soi. L’œuvre ne se donne pas d’un bloc, elle évolue selon l’angle, la lumière, la distance.

Dans cet espace, les distinctions entre sculpture et peinture deviennent secondaires. Une structure tridimensionnelle peut évoquer une ligne flottante ; une surface textile, un aplat pictural. Certaines pièces semblent presque en lévitation, d’autres suggèrent un mouvement figé dans le temps. L’expérience du regard est dynamique, changeante, et requiert une attention soutenue.

Gap in the clouds, c’est cette ouverture dans la perception, ce moment où quelque chose échappe à la lecture immédiate. Les œuvres ne cherchent pas à imposer un discours, mais à générer un espace d’observation active. Elles offrent une forme de clarté complexe, à la fois physique et sensible.

Ici, l’équilibre n’est pas une destination mais un état intermédiaire, entre construction et instabilité. Et c’est précisément dans cette tension que réside la force du travail d’Henrik Eiben.