Il est possible de ne pas être amateur d’art contemporain (peinture et sculpture), même si certaines œuvres nous touchent, mais pour autant lui reconnaitre le droit d'exister.

Ainsi, on a pu observer, en septembre, les réactions outrancières concernant l'emballage de l'arc de triomphe. Mais, comme c'est souvent le cas lorsque cela touche des monuments ou lieux emblématiques, cela n'a plus de mesure dans la détestation.

Le propre de l'art, c'est que chacun y projette ce qu'il veut, chacun le reçoit de façon différente. C'est le but! Une œuvre existe lorsque chacun se l'approprie à sa manière, selon son état d'esprit.Dire que l'on trouve cela moche est un droit qui reste cependant subjectif. Dire que cela ne vaut rien, qui est-on pour l'affirmer, surtout que cela résulte d'une démarche et d'un travail. Hurler que le coût est faramineux – 14 millions d'euros – n'a guère plus de sens. Cela pourrait s'entendre si cette somme avait été payée par la collectivité – et encore... toute forme d'art a un coût, mais que seraient nos vies sans art ? – de toute façon il n'est pas question de cela ici puisque c'est la fondation Christo qui a payé, et elle est bien libre d'engager ses fonds comme elle l'entend non? Il n'y a que pour la culture que l'on trouve les coûts trop ruineux, la gabegie financière du foot professionnel gêne beaucoup moins de monde.

Et pour être franche, certaines photos du monument emballé sont très belles, invitent à la rêverie. Parce que sous les draps se cache le mystère, s'efface l'aspect guerrier de l'édifice – et rien que ce dernier point doit être souligné. L'art contre la barbarie et la violence, même de façon éphémère, c'est toujours une petite victoire. D’un autre point de vue, l’emballement ne cache-t-il pas ce que les Parisiens finissaient par ne plus voir? Chacun sait qu’à force de côtoyer, nos yeux fait abstraction de ce qui leur devient habituel, c’est ainsi. De ce point de vue, lorsque l’arc tombera ses voiles il fera renaître l’émerveillement devant le plus petit bas-relief. Rien que pour cela, la fondation Christo devrait être remerciée.

Que ne peut-on donc savourer tout simplement cela plutôt que de s'égosiller de façon stérile ! Parce que, soyons francs, que proposent ceux qui souhaiteraient voir détruit cela ? Rien !

L'art nous interroge sur ce qu'est notre société. Force est de constater qu'actuellement, on drape beaucoup de choses, à commencer par certains plans ici même sur les réseaux sociaux, à commencer par les tétons féminins – cachez ce sein que l’on ne saurait voir ! Nous nous voilons la face sur la barbarie, sur l'inhumanité de certains pouvoirs de par le monde. Et si c'était cela justement, le message de cette œuvre ?

Que deviendraient nos monuments s'ils tombaient sous le joug de fanatiques . L'art n'a jamais fait bon ménage avec l'obscurantisme, ça a été le cas avec les nazis jadis, avec les Talibans en Afghanistan, avec Daech et ses destructions archéologiques.

À tous les censeurs qui crachent leur venin, réfléchissez bien à tout cela. Iriez-vous jusqu'à détruire ? Cela s'est vu sur certaines œuvres ayant fait polémique dans le passé. Si oui, vous ne valez pas mieux que ceux qui pratiquaient les autodafés dans l'Allemagne des années noires, que les hordes sauvages destructrices de Bouddhas ou de cités antiques.

L'art est fondateur et pilier de la civilisation et ce, quel qu'il soit et de quelque façon qu'il s'exprime. Il n'y a pas à tergiverser avec cela.